Lecture vivante et réjouissante de Les Esprits de la terre, de Catherine Colomb – Episode 4
La Filature, Espace MarkdeFabrick, chemin de la Condémine, 1315 La Sarraz Chemin de la Condémine, La SarrazEpisode 4 Les Esprits de la terre (extrait)
Elle fondit en larmes. Elle n’était pas jolie, la peau jaune piquetée de rouge comme une truite, si elle avait filé entre deux eaux, à la bonne heure ! Mais elle vivait dans les chambres du Jura qui sentent la gentiane et la petite centaurée. Un tambour à vitres de couleur empêche l’air de pénétrer dans le vestibule dallé de gris et bleu, le ciel essaie en vain d’entrer de l’autre côté par les étroites fenêtres aux vitres triplées, car ils savent là-bas qu’il nage d’étranges poissons entre les étoiles ; sur la tablette, un psautier, un tricotage, des herbes sèches. « Ma fille, dit la mère qui a élevé Lord Arthur et qui voit souvent dans ses rêves le valet à grande bouche de grenouille et Lady Basil qui glisse vers les cabinets parfumés de pommes de pin où elle passe des heures à lire Shelley, ma fille, si tu veux être jolie, mets des abat-jour roses à tes lampes. » Pauvre Mélanie ! Elle a une grande bouche molle dont les mots sortent informes; chacun envahi d’un senti- ment d’impuissance garde les yeux fixés sur cette bouche qui travaille, le nez s’en mêle, les mots sortent du nez et sentent la fourmi.